Philippe Decouflé s'empare du célèbre ballet et livre une version au croisement du théâtre, de la danse et du cinéma.

Quelle bonne idée, en effet, de reprendre Shazam, un ballet emblématique qui a beaucoup marqué lors de sa création en 1997 et qui a, peu de temps après, participé aux célébrations du cinquantième anniversaire du Festival de Cannes. Il y avait alors une raison tout fait logique à cela puisque cette chorégraphie spectacle est un hommage au cinéma, "élégant, joyeux et potache", un ravissement qui use habilement d'effets d'optique, de jeux de miroirs, d'écrans suspendus, de vidéos, de films, mais emprunte aussi au théâtre, au mime et à la magie. Et la danse ? Elle intervient en mode époustouflant, avec une dizaine de danseurs hommes et femmes emportés par la beauté du mouvement, des musiques originales, les costumes magnifiques du fidèle Philippe Guillotel, les lumières, quelques sublimes bizarreries, et "une atmosphère de féerie indescriptible".

Un humour délicieusement vagabond

Shazam (l'abracadabra des magiciens et des sorciers) avait tous les arguments pour inspirer Philippe Decouflé. Le danseur chorégraphe a fondé sa compagnie DCA en 1983. DCA, soit Diversité, Camaraderie, Agilité, a suivi son mentor dans toutes ses créations, des spectacles totaux imaginés par un artiste à part profondément marqué par Alain Nicolaïs, Merce Cunningham ou encore Oskar Schlemmer, artiste et scénographe du Bauhaus. De la scène (Codex, Decodex, Désirs, le Wiebo Concert, Courtepointe, Nouvelles pièces courtes, etc.) aux Jeux Olympiques d'Albertville en passant par Broadway en 2016 où il fut le premier français in situ à présenter un spectacle pour le Cirque du Soleil, Philippe Decouflé fait souffler un vent singulier et enchanteur sur l'univers de la danse. Le reprise de Shazam, co-produit cette fois par Le Volcan, scène nationale du Havre avec le soutien de Chaillot, Théâtre national de la danse, annonce quelques nouvelles pirouettes car "le spectacle n'est jamais fini" mais propose toujours le même "rêve éveillé" inspiré, comme l'explique le chorégraphe qui enfant voulait être auteur de bandes dessinées ou clown, entre Tex Avery et Groucho Marx. "J'aime cultiver la prise de risque malicieuse" confie Philippe Decouflé, et dans cet art, c'est un maître du genre...